L'automne des Canaries
Marc-Antoine Girard de Saint-Amant (1594-1661)
Voici les seuls coteaux, voici les seuls vallons
Où Bacchus et
Pomone ont établi leur gloire ;
Jamais le riche honneur de ce beau
territoire
Ne ressentit l'effort des rudes aquilons.
Les figues, les
muscats, les pêches, les melons
Y couronnent ce dieu qui se délecte à boire
Et les nobles palmiers, sacrés à la victoire,
S'y courbent sous des
fruits qu'au miel nous égalons.
Les cannes au doux suc, non dans les
marécages,
Mais sur des flancs de roche, y forment des bocages
Dont
l'or plein d'ambroisie éclate et monte aux cieux.
L'orange en même jour
y mûrit et boutonne,
Et durant tous les mois on peut voir en ces lieux
Le printemps et l'été confondus en l'automne.