Bêtise de la guerre
Victor Hugo (1802-1885)
Ouvrière sans yeux, Pénélope imbécile,
Berceuse du chaos où le
néant oscille,
Guerre, ô guerre occupée au choc des escadrons,
Toute
pleine du bruit furieux des clairons,
Ô buveuse de sang, qui, farouche,
flétrie,
Hideuse, entraîne l'homme en cette ivrognerie,
Nuée où le
destin se déforme, où Dieu fuit,
Où flotte une clarté plus noire que la
nuit,
Folle immense, de vent et de foudres armée,
À quoi sers-tu,
géante, à quoi sers-tu, fumée,
Si tes écroulements reconstruisent le mal,
Si pour le bestial tu chasses l'animal,
Si tu ne sais, dans l'ombre où
ton hasard se vautre,
Défaire un empereur que pour en faire un autre ?